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mercredi 17 juillet 2013

Contes et légendes du Mor Braz occidental (3)



La houppelande magique.


Il était une fois, il y a bien plus que très longtemps, dans le bout du presque bout du Mor Braz occidental, un petit village peuplé de quelques poignées de lutins qui vivaient paisiblement. En cette époque reculée, les lutins rusés et malins et inversement et réciproquement connaissaient déjà la nécessité de s’organiser. C’est pourquoi ils avaient porté à la tête de leur petite communauté des lutins ou des fées supposés veiller au bien de tous.
Ainsi, la fée Madamjai, le père Fanch, aussi appelé le lutin bâtisseur car il construisait sans trêve ni repos routes et bâtisses jusque et y compris dans les champs de poireaux si l’on en croit de vieux parchemins récemment retrouvés, Yann le constructeur de pont anglais venu d’au-delà l’endroit où la terre se rétrécit, Hérik le lutin joyeux ainsi nommé par ses pairs car il organisait toutes les fêtes du village, Elesbed Hindebrék’feust la spécialiste de l’accueil des elfes, nains et gnomes étrangers au village et quelques autres lutins et lutines dont Bécassine (qui est définitivement ma cousine) veillaient à la bonne harmonie du village.

Les lutins étant des râleurs par excellence, de temps en temps, au cours de grandes cérémonies qui avaient lieu chaque mois à la nuit tombée, sauf en gouhere et en eost, mois qui sont aux réunions de lutins ce que les mois sans R sont à la consommation des huitres, la fée Madamjai sortait de sa vaste houppelande magique un skoazell voire moult skoazells pour que le lutin bâtisseur puisse construire tout ce à quoi rêvaient les lutins voire même ce à quoi ils ne rêvaient pas du tout, mais alors pas du tout du tout, pour qu’Hérik organise des danses entre les menhirs et pour qu’Elesbed Hindebrék’feust trouve, hors du Mor Braz occidental, un druide diplômé bilingue lutin-nains.

La vie aurait pu continuer paisiblement ou presque. Mais, chez les lutins, il était interdit de porter la houppelande magique pendant trop longtemps. Se posait alors, de temps en temps, la question de savoir qui allait revêtir ce magnifique habit, source de puissance, d’amour, gloire et beauté mais aussi d’immunisation contre le « mal ardent » maladie que les lutins craignaient bien plus que de voir le ciel leur tomber sur la tête, guérissait de la maladie des écrouelles et immunisait contre la toxoplasmose !

Le père Fanch se serait bien vu enfiler cet habit magique et il avait pour cela l’approbation de la fée Madamjai qui aspirait à une paisible retraite. Il est à remarquer que curieusement à cette époque lointaine, le régime de retraite des fées était particulièrement avantageux. Autre temps !  A la perspective de vêtir la houppelande les poils de la barbe du père Fanch frisouillaient de bonheur. Mais d’autres lutins, nombreux, pensaient que cette houppelande se révèlerait à l’usage bien trop grande pour lui et qu’il finirait par se prendre les pieds dedans.

Non loin de ce tranquille village, dans une grotte cernée par des nids de courlis, vivait Poulpiquet qui, après être parti bouder des jours en des jours en pleine mer, était subrepticement revenu par une nuit sombre et funeste. Poulpiquet rêvait également de se couler dans la houppelande magique aux fins de distribuer, lui aussi, moult skoazell pour mener à bien des projets fumeux et prouver ainsi à ces imbéciles de lutins qu’il était bien plus intelligent qu’eux. Mais tous les lutins qui le croisaient marmonnaient en le voyant « Mankout a ra loaiad dezhan ! *». L’affaire était donc mal engagée pour l’acariâtre korrigan.

Un soir, alors que Poulpiquet dévorait force de cumumis sativus pour son diner, il eut une idée. Il lui fallait « un programm, ar programm !». Il se saisit alors d’un grimoire en peau de poulpe et trempant une plume de goéland dans un bocal contenant une décoction de vinaigre blanc et d’eau il commença à écrire.

- En finir avec la bande des cinquante Mhêtes. (NDT : les Mhêtes étaient une bande de gnomes qui s’étaient installés il y a fort longtemps au plus près de l'océan et que Poulpiquet voulait chasser loin du village, jaloux qu’il était que sa caverne n’ait pas une belle vue sur la mer).

- Utiliser « ar neudenn » pour attacher des « clahoudes » au dessus du village.  

Poulpiquet se dit que pour ça il faudrait une très grosse skoazell mais avec la houppelande magique tout serait possible.

- Construire une route plus large pour se rendre chez Yann Ar Véloioù le chef du village voisin qui avait une houppelande encore plus belle que celle de la fée Madamjai. Ainsi il attendrait moins longtemps ses bocaux de « Fin de Meaux » et « d’Amélioré de Bourdonne ».

- Imposer à ces crétins de lutins son projet de gigantesque chaudron.

Une fois la rédaction de son parchemin terminé, Poulpiquet alla le placarder sur tous les arbres du village et de ses alentours puis s’endormit du sommeil du juste.

Le lendemain matin, les lutins découvrirent la prose de Poulpiquet. Tous rirent à s’en tenir les côtes. L’un d’eux eut même une idée.

Quand Poulpiquet se réveilla et alla, en rasant les murs, effectuer un tour dans le village il découvrit ses grimoires recouverts d’une phase bien ironique : « A-raok kanan ar gosperoù e ranker anaout an oferenn abred ** ».

* Il lui maque une louche à celui-là (il a une case de vide).
** Avant d'attaquer, il faut connaitre son affaire.  
Et pour les quelques mots qui trainent de ci de là : Dico breton 

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